Le sport de haut niveau dans son ensemble, connaît sans doute une crise de doute et de performance qui est inversement proportionnel à ce qui est investi pour son développement. On peut se poser alors la question du pourquoi, du comment, d’où viennent nos malheurs ?
Dans un premier temps il faut sans doute analyser notre bonne société française qui essaye depuis quelques décennies à appliquer pour tout et n’importe quoi, « l’égalité » de sa chère devise. On s’aperçoit avec l’expérience que cette égalité défendue avec âpreté n’existe que face aux institutions. Elle disparaît avec magie lorsqu’on dépasse ce cadre et que l’on pénètre sur un terrain sportif quel qu’il soit…
Pour le rugby, c’est encore plus terrible. Il n’existe que très peu de cette égalité entre les joueurs si ce n’est avec les règles car pour vaincre il faut les meilleurs…et on peut alors se rendre compte, que face au ciel nous sommes tous bel et bien différents : Un physique, un mental…ça ne s’achète pas !
**Update : voir l’excellent article intitulé « le rugby dans la peau » pour une plongée dans l’histoire du rugby
Dans un deuxième temps, il faut regarder de près le système éducatif et sportif français et sa volonté de niveler, de donner une soit disant chance universelle à chacun en tirant inexorablement le groupe dans son ensemble vers le bas car c’est immanquablement se mettre au niveau du plus faible que de vouloir rendre les gens égaux.
On en arrive donc ensuite à autopsier chaque discipline sportive pour trouver les remèdes aux maux. Chercher l’excellence, la performance, n’est pas honteux ni discriminatoire mais simplement juste face à la réalité de chacun face à lui-même.
Vient ensuite le troisième temps de réflexion. C’est celui tourné vers les autres et leurs pratiques lorsqu’on arrête de se regarder le nombril et de se dire en se tapant dans le dos que nous sommes les meilleurs…
Lorsque les néo-zélandais pensent que l’essentiel est la formation technique individuelle, dans l’hexagone nous cherchons à former un groupe, un collectif et partir ensuite vers la technique individuelle. Pour certains entraîneurs encore en activité, il est impensable de voir un pilier faire un cadrage: Il est juste là pour pousser cet abruti!!
Lorsque l’hémisphère sud pense qu’il faut que, quel que soit le niveau de compétition les mêmes techniques soient enseignées, chez nous, pour les divisions de campagne, on supprime la poussée en mêlée, on change les règles du levé en touche pour soit disant protéger les joueurs. Mais a-t-on pensé à mieux former ces joueurs, à mieux former les arbitres des petites divisions (1)?
Lorsque l’ensemble de l’hémisphère sud joue au rugby à l’école (2), chez nous, on badmintonise, on danse, voleyise et ping-ponguise de peur de voir nos charmantes têtes blondes se salir car de toute façon il n’y a pas de douche après la séance de sport et en plus on évite le pire: La blessure!!!
Il ne faut absolument pas traumatiser ces jeunes coqs et coquelettes avec de l’effort, du travail et par-dessus tout la concurrence dans la pratique sportive. Il faut un accès pour tous dans la joie et l’éveil du corps sans contrainte, sans compétition. Il faut s’approprier ce sacré référentiel bondissant aléatoire plutôt que d’attraper ce p…. de ballon. Il est interdit de sélectionner et de trier. Maître mot: Egalité!. Il n’y a plus de joueur mais des intervenants. Il n’y a plus d’attaquants mais des utilisateurs et les défenseurs deviennent des opposants…
Finalement là où un néo-zélandais s’endurcit, nous nous ramollissons et peinons ensuite à trouver une première ligne à mettre sous le maillot bleu.
C’est un terrible constat et nous pouvons ensuite nous plaindre des nombreux joueurs étrangers en France mais ce résultat fait parti d’un tout qui comprends une analyse complète du système. Il ne s’agit pas non plus de faire l’apologie des autres façons de faire mais d’ouvrir les yeux sur le monde. Un savant mélange permet sans doute de trouver la bonne formule, mais pour cela il faut l’humilité nécessaire et la conscience que la performance est un éternel recommencement et un tout aussi éternel renouvèlements.
(1) Il existe des manuels et des vidéos de formation des entraîneurs et des arbitres afin garantir la sécurité des jeunes joueurs dans les phases délicates de la mêlée et de la touche.
(2) Les équivalents des collèges et lycées néo-zélandais, africains du sud et australiens, jouent des compétitions chaque week-end et finissent par une joute internationale. Cela ajoute à la motivation naturelle des jeunes pour le rugby une dimension morale et patriotique que l’on a oublié en France. Pour exemple la Auckland Grammar School, a fourni 50 All blacks depuis 1893 et est fière de le dire et de le montrer.
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